Ce sont des aventures, des paysages et des rencontres extraordinaires qui nous attendaient pour la seconde partie de notre circuit en Mongolie avec nos trois enfants. Après la première partie de notre photoreportage, en voici donc la suite. Pour l’heure, vous trouverez les photos sur notre page Facebook.
7e jour – 26 août
Région protégée de Yoliim Am et Bearded Eagle Canyon
Soyol nous invite en ville dans sa famille, où on célèbre la cérémonie de la première coupe de cheveux de sa nièce de quatre ans. Famille et amis sont réunis dans la yourte, autour d’une table garnie de victuailles. On nous invite à prendre place sur un lit-banquette à droite du patriarche. Peu au fait des conventions, les garçons s’assoient directement à côté de lui, ce qui semble le faire sourciller. En effet, cette place, située du côté des hommes, est la place d’honneur. Les convives semblent avoir déjà mangé. On nous tend des plats, sans assiette. Observés avec intensité et curiosité, nous tentons de nous rappeler les nombreuses règles de bienséance ou la « yourtiquette ». Nous enchaînons très certainement les faux pas, mais faute d’indications, nous sommes un peu perdus. Nous misons sur leur indulgence. Nous goûtons tous les plats, dont une délicieuse soupe de moutons et de nouilles, une salade qui semble contenir de la langue hachée et que les enfants ont du mal à faire descendre (lire : que Margot crache par terre après plusieurs haut-le-coeur), le thé au lait mongol et l’aïrag, cette fameuse boisson de lait de jument fermenté. Nicolas accepte les verres de vodka et hume poliment le tabac à priser dans une fiole travaillée. L’énorme gâteau au glaçage trop généreux est servi. Soyol est désigné pour couper une mèche de cheveux de la petite. On tend les ciseaux à Nicolas, mais la petite voyant la chose autrement, il décline. Nous remercions ensuite nos hôtes profusément, une politesse qui nous est retournée avec effusion par le patriarche, déjà passablement éméché (un petit bisou sur la bouche, Nicolas?). Dans la camionnette, Soyol se confond en excuses. Pas de souci, pour nous, la courte visite a été des plus enrichissantes.
Vous connaissez l’existence du pika? Jusqu’ici, nous non plus. Mais nous avons la chance d’en apercevoir dans le canyon. Ce mignon mammifère cousin du lapin émet un petit couinement strident qui permet de le repérer facilement. Mais attention, c’est un p’tit vite! Il ne se laisse pas photographier facilement. Vous dire les galipettes que j’ai dû faire, ma fille au dos et l’appareil photo au garde à vous…
En soirée, nous faisons la rencontre de Marine, Greg et Lucie qui ont loué un véhicule. Pour des raisons techniques, ils nous suivront pour les prochains jours.
Note à moi-même : me rappeler du mot « pika » pour le Scrabble.
8e et 9e jours – 27 et 28 août
Dunes de sable Khongor
Nous arrêtons au caravansérail de yourtes à l’orée des dunes du désert de Gobi. Avec nos amis français, nous entreprenons en soirée l’ascension de l’une des plus hautes dunes de sable de Mongolie, la Dune Chantante, qui fait 300 m et qui s’étend sur 180 km. La montée est éprouvante. Chaque pas est laborieux dans le sable instable et fin. Rien à voir avec la marche en montagne. Je dois faire la conversation à Margot qui, dans le porte-bébé, s’ennuie à ne rien faire. Au bout d’un moment, je la laisse sortir le temps de reprendre mon souffle. Elle ne voudra plus y remonter. Avec des yeux de trois ans, ce grand carré de sable sans fin est une invitation à jouer. C’est donc ce que nous faisons, elle et moi, en attendant les autres qui se sont bel et bien rendus au sommet. Leur victoire, récompensée par le début du coucher du soleil, est toutefois de courte durée, le vent balayant le sable en fouettant les visages curieux et essoufflés.
Le lendemain, un guide nous attend pour faire un tour de chameau. Julien prend place avec le guide, Raphaël avec Soyol. Margot refuse catégoriquement d’approcher de la bête laineuse montée par Nicolas. Bon, il faut dire que ça ne sent pas très bon… Nous regardons donc partir les garçons. Ils reviennent peu après, peu convaincus de leur aventure. Nous profitons donc de l’après-midi pour partir explorer un ruisseau à proximité de l’oasis, où nous testons les limites des sables mouvants.
En soirée, c’est le paquet de tarot qui fait son apparition. Raphaël et Julien y sont initiés avec joie.
10e jour – 29 août
Bayanzag « Flaming Cliffs »
Nous poursuivons notre route vers cette région où, il y a près de 100 ans, l’expédition de Roy Chapman Andrews, paléontologue américain, a notamment mis au jour un oeuf de dinosaure, ainsi que des os de géants ayant vécu il y a 70 à 80 millions d’années. Le décor est époustouflant et n’a pas grand chose à envier aux grands parcs américains.
11e jour – 30 août
Monastère Ongi
Les Français nous offrent le dîner au moment du passage dans une petite ville.
Nous visitons ensuite des ruines de deux anciens monastères, situés de part et d’autre de la rivière Ongi. Fondés en 1660, les deux complexes abritaient vingt-huit temples, plusieurs édifices administratifs et rien de moins que quatre universités bouddhistes. À leur apogée, on aurait pu y apercevoir un millier de moines. Malheureusement, les deux monastères ont été la cible des épurations idéologiques menées en 1939 par le chef du parti communiste de Mongolie. Plus de deux cents moines ont perdu la vie, et plusieurs survivants ont été emprisonnés ou forcés à défroquer pour intégrer l’armée communiste. Un petit musée présente quelques-uns des objets qui ont été conservés.
12e et 13e jour – 31 août et 1er septembre
La chute et les yaks
Nous faisons nous adieux à nos sympathiques compagnons de voyage. En quelques heures, nous traversons des décors tout autres. Des vallées baignées de soleil se succèdent entre des montagnes sur un fond de ciel gris fâché. Des pieds de vent éclairent de nombreux troupeaux qui paissent paisiblement dans la fraîcheur alpine. Le sol est jonché de roches de basalte. Devant un cadre si serein, il est difficile de croire que le paysage est né dans la violence inouïe des éruptions volcaniques et des tremblement de terre.
Nous restons deux nuits dans un camp de yourtes tenu par un couple âgé. Lui, nous surprend avec quelques mots de français. Elle, nous fait essayer des ders (vêtements traditionnels des familles nomades, toujours portés aujourd’hui) qu’elle fabrique de ses blanches mains. Une jolie promenade nous mène à une chute de 20 m qui coule entre les formations rocheuses. Soyol nous prépare une succulente soupe, recette de sa grand-mère. Les bêtes des environs sont nombreuses et heureuses. Les enfants, eux, goûtent de nouveau la liberté quasi totale. Ils sont au comble du bonheur en rassemblant le troupeau de gros сарлаг laineux (yaks) pour la traite, en compagnie d’un garçon de ferme qui les prend sous son aile. Ils apprennent beaucoup et cumulent des expériences inoubliables et hors du commun! Que pensent-ils de leur rentrée scolaire de cette année, vous croyez? Je vous laisse deviner… Un indice? Julien ne veut plus partir, et nous supplie de le laisser en Mongolie.
14e et 15e jour – 2 et 3 septembre
Sources thermales Tsenkher
Plusieurs heures un peu tape-cul nous séparent de notre prochaine étape. D’ailleurs, un problème mécanique de la camionnette nous force à arrêter. Heureusement, Soyol est plein de ressources et répare le problème à tout coup en une heure ou deux.
Nicolas continue de perfectionner son mongol à une vitesse surprenante. Les enfants accumulent aussi les nouveaux mots, mais surtout, prennent beaucoup d’aisance en anglais. Margot gagne la palme quant à la prononciation du баярлалаа (merci) qui donne du fil à retordre à tout le monde.
Nous arrivons en fin de journée aux sources thermales. Nous faisons tremper avec délice nos courbatures des deux dernières semaines (merci à des lits durs comme du bois) et nos corps frissonnant d’avoir goûté à l’automne précoce de Mongolie. Eh bien, avec délice, dans la mesure où nous voyageons avec trois enfants turbulents qui tendent à percevoir un volume d’eau comme une piscine plus que comme un lieu de détente. Mais bon…
16e et 17e jour – 4 et 5 septembre
Un petit arrêt en ville pour refaire des provisions et pour dîner (Soyol nous invite). Nous entrons une fois encore dans un tout nouveau décor. Dodo dans une yourte en surplomb d’un lac d’eau cristalline fréquenté par de nombreux oiseaux. Il commence à faire très froid; nous enfilons maintenant les combinaisons aussitôt arrivés à destination et les nouvelles mitaines et tuques en laine de yaks sont bien mises à profit. Nous devons alimenter le poêle au bois durant la nuit.
Nous évoquons l’idée de goûter à la viande de marmotte. Le propriétaire du camp nous indique qu’il fait très froid pour la chasse. Soyol nous surprend toutefois au moment du coucher avec un petit morceau à partager à cinq. La chasse a donc été fructueuse. À noter que la cuisson de la marmotte se fait sous la terre. La viande a un goût boisé très prononcé. Margot dit se régaler.
Au petit matin, en ouvrant la porte de la yourte, nous sommes accueillis par la première neige de la saison. Magnifique!
Bien habillés, nous montons le mont Khorgo. Cet ancien volcan, aujourd’hui éteint, a parsemé la région de ses rochers de basalte et a laissé couler quantité de lave vers le lac il y a huit mille ans pour y former des jetées naturelles.
18e jour – 6 septembre
Rocher Taikhar
Selon la légende, il y a longtemps, un serpent géant est sorti d’un trou dans le sol pour terroriser la région. Désespérés, les habitants ont sollicité l’aide de Bugkbilegt. Le vaillant héros a terrassé la bête en la mettant dans un trou, qu’il a recouvert d’un rocher. Le monstre a tenté d’en sortir, mais en symbole de sa force et de son courage, Bugkbilegt a déposé sa flèche est son arc favoris sur la roche pour l’en empêcher.
Nous avons bel et bien visité le rocher Taikhar. Aucune trace du serpent. Grâce au concours de ce jeune homme? Sais pas. Quoi qu’il en soit, nous avons tous pris une douche sous un mince, mais bénéfique jet d’eau chaude.
19e jour – 7 septembre
Lac Ogii Nuur
Les dernières journées s’enchaînent vite. Nous faisons halte pour une nuit sur le bord d’un joli lac fréquenté par plusieurs espèces d’oiseaux. Soyol accepte de nous montrer à faire des khuushuur, de petites crêpes traditionnelles frites et farcies de viande et parfois de légumes. Il les manipule avec beaucoup d’habileté (il en fait depuis qu’il a 6 ans). Nous, moins. On trouvera bien des cobayes à notre retour.
20e jour – 8 septembre
Karakoroum
Nous visitons aujourd’hui l’ancienne capitale de l’empire mongole, qui a déjà été la première ville en importance au monde. Genghis Khan y établit son camp, et la ville est fondée en 1220 par son fils Ögödei. Elle devient non seulement le siège de l’administration de l’énorme empire et un haut lieu commercial et culturel, mais aussi un pont entre l’Orient et l’Occident. Dans son enceinte, se côtoient notamment nobles, artisans, administrateurs, ambassadeurs et missionnaires de partout, qui fréquentent les temples, églises et mosquées. Quelques décennies plus tard, Kublaï Khan, petit fils de Gengis devenu empereur chinois, transfère la capitale de Karakoroum à l’actuelle Beijing. On imagine aisément les habiles cavaliers mongols quitter l’endroit pour conquérir le gigantesque territoire qui s’étend du Pacifique à la mer Caspienne.
Peu subsiste de l’ancienne cité. On peut toutefois visiter le sanctuaire bouddhique de l’Edente-Zuu, construit au 16e siècle, tout près des ruines de l’ancienne capitale. Le monastère, encerclé d’une longue muraille composée de 108 stupas, a longtemps été le sanctuaire religieux le plus important de Mongolie. Partiellement détruit par les Soviétiques, il a depuis été reconstruit. C’est un site de l’UNESCO, pis toute. Nous y assistons à une cérémonie bouddhiste au son du chant des moines, pendant laquelle on nous passe un bol d’aïrag. Yiiiish!
21e jour – 9 septembre
Elsen Tasarkhai (petites dunes)
Nous séjournons dans un camp situé au lieu improbable de la rencontre entre de petites dunes, des montagnes de granit et un ruisseau cristallin. L’effet est spectaculaire. Pour nous, c’est aussi la dernière soirée de l’expédition. Chameaux, chèvres et moutons se donnent le mot pour nous faire leurs adieux.
22e jour – 10 septembre
Parc national Khustai
Pour cette dernière journée, et certes pas la moindre, Soyol nous invite à diner. Nous visitons le parc national Khustai. C’est le lieu où a été réintégrée en milieu naturel la seule espèce de cheval sauvage après sa disparition. Nous ratissons les grands espaces montagneux du regard, depuis la camionnette, dans l’espoir d’apercevoir l’un des rares chevaux de Prjevalski ou takh. C’est loin d’être une garantie! Soyol en aperçoit au loin dans la montagne. Really? Bon, s’il le dit. Nous marchons dans leur direction, jusqu’au sommet d’une colline, afin de les observer sur leur flanc de montagne. Ce sont d’abord cinq chevaux devant lesquels nous nous émerveillons, puis un vingtaine, puis finalement, près d’une soixantaine! La photographe pour National Geographic en moi, qui a raté sa carrière, est au comble du bonheur et au bout de son modeste zoom, faisant cliqueter à qui mieux mieux le déclencheur de son appareil comme une vraie démente. Ça donnera ce que ça donnera, mais les limites de la technologie ne pourront en rien assombrir ce moment glorieux en famille.
Puis, c’est le retour vers la capitale.
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Un gros merci à Urnaa et Soyol, propriétaires de Vast Mongolia Tours and Guesthouse, qui n’ont pas lésiné sur les petites et grosses attentions pour faire de cette expédition une réussite à petit prix. Un voyage en Mongolie, c’est avant tout une occasion de vivre des moments et des expériences uniques et de faire des rencontres inoubliables.
Que d’aventures vous vivez !
Les enfants auront des souvenirs inoubliables . La vie au retour au Québec sera t elle nourrir autant leur imaginaire ? Ce sera certainement un défi.
Bonne continuité dans votre voyage incroyable et dans le récit fabuleux que vous nous faites. Grâce à votre écriture je vis un voyage extraordinaire.
Xxx
Anne
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